mardi 21 novembre 2017

Complexité biologique et déterminisme génétique

À l'heure où le développement de la biologie commençait à vouloir rompre avec le réductionnisme moléculaire, et nous faire aborder la complexité biologique, le CCNE mettait en garde : « Le mythe du gène support du programme de la vie est tel que cela conduit à l’illusion qu’une connaissance parfaite du génome d’un individu donnerait accès à la réalité et au destin d’une personne. C’est cette image à laquelle renvoie une métaphore comme celle du « grand livre de la vie », dont il suffirait de connaître l’alphabet et la syntaxe génétique pour parvenir à l’essence de l’être. Or une telle conception est scientifiquement inacceptable et éthiquement dangereuse ». Pourtant, les prouesses techniques en matière de tests génétiques, génératrices d’une illusion de simplicité, et utilisant un langage fait de codes et de prédispositions, semblent nous entraîner du réductionnisme à un certain déterminisme, comme si nos gènes « faisaient tout » et nous affranchissaient, s’affranchissaient des relations que nous entretenons avec notre environnement, notre éducation, toute cette histoire qui fait de nous des humains. Le génome ne fixe pas notre destin, et la connaissance du génome ne nous est pas encore d’une grande utilité dans la prise en charge des maladies complexes et multifactorielles qui forment l’essentiel de la charge de santé publique dans une population vieillissante. La complexité biologique ne peut, pas plus que d’un déterminisme génétique, s’accommoder de l’idée qu’un génome standard serait définissable. Imaginer qu’il existerait un « génome normal », figé en quelque sorte lors de l’évolution de l’humain par rapport aux primates non humains, et qu’il conviendrait de préserver, est une illusion. Parler de gènes normaux et de gènes mutés est une aberration, puisque tous nos gènes, produits de cette évolution, sont, par définition, des gènes mutés. Il existe des mutations rares ou fréquentes, on parle plutôt de variants dont certains provoquent des maladies et d’autres pas.