mercredi 6 juin 2018

Face à la liberté

À chaque rencontre avec des autorités musulmanes, le Pape et les membres de la diplomatie du SaintSiège insistent sur le nécessaire respect de la liberté religieuse. Cela inclut la liberté pour les chrétiens de pratiquer leur culte ainsi que d’ouvrir des écoles et de diffuser des livres chrétiens. Mais cela inclut aussi pour les musulmans la liberté de changer de religion et de se convertir au christianisme. Une liberté qui n’est absolument pas reconnue et un acte qui est passible de mort. Défendre la liberté religieuse c’est mettre les chefs musulmans en face de contradictions. Ils ne peuvent pas officiellement dire qu’ils sont contre, car ce faisant ils s’opposeraient aux traités internationaux et à l’esprit même de l’ordre mondial actuel fait de tolérance, d’ouverture et de respect des consciences individuelles. Mais s’ils disent, à l’extérieur, qu’ils sont pour, alors ils sont en contradiction avec leurs pratiques internes où cette liberté n’est pas permise. Du reste, si la liberté religieuse était accordée cela constituerait un tel bouleversement politique et intellectuel qu’il est fort possible que les régimes religieux n’y survivraient pas, de la même façon que les régimes communistes ont été emportés par la liberté politique et intellectuelle. Or cette liberté est loin d’être gagnée, notamment en Égypte. Le pays est travaillé par les Frères musulmans qui sont largement subventionnés par l’Arabie Saoudite. L’État islamique a une branche en Égypte et les islamistes gangrènent de plus en plus les esprits. En 2011, c’est bien un islamiste, M. Morsi, qui a gagné les élections présidentielles, avant d’être renversé par un coup d’État militaire en juillet 2013. Précédemment, le référendum de décembre 2012 avait entériné la nouvelle constitution à une large majorité. Or celle-ci intègre la charia comme base juridique de l’Égypte, permettant ainsi une islamisation intensive de la justice. Al-Sissi n’a pas abrogé ces articles même si, pour l’instant, ceux-ci sont appliqués sur un mode mineur. Cette évolution est conforme à l’islamisation croissante de la société, façonnée par l’idéologie wahhabite. Le Pew Research Center a effectué plusieurs sondages dans les pays musulmans qui révèlent que l’Égypte est le pays le plus enclin au radicalisme : . 95% voudraient que les conflits en matière de famille et de propriété soient tranchés par des juges religieux. . 86% sont favorables à la peine de mort pour ceux qui abandonnent l’islam . . 81% sont en faveur de la lapidation de celui qui se rend coupable d’adultère. . 75% de la population égyptienne considère que la charia est la parole de Dieu révélée. . 75% voudraient que la charia s’applique non seulement aux musulmans, mais également aux nonmusulmans. . 74% souhaitent que la charia devienne la loi de l’État. . 70% sont en faveur de châtiments corporels pour punir des crimes comme le vol. On le voit, il n’est pas vain de défendre la liberté. Pour cela il y a les mots bien sûr et les paroles, mais aussi les symboles, tout aussi puissants et importants.